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7 janvier 2018 7 07 /01 /janvier /2018 17:16

 

 

Épatant comme c’est la panique, à translande, quand ce n’est pas carrément l’indignation, quand on se met à causer un peu posément de ce qui se passe, du non consensuel et des questions de fond, de ce dont nous venons et où nous allons peut-être dans le social, d’autre chose quoi que de l’application idéale des catéchismes – application évidemment toujours en berne, quoi qu’on pense par ailleurs de leurs contenus et implications. Ça ne nous est pas propre, tout ce qui se vit comme minorité professe une trouille bleue de tout examen de ses grandes affirmations (censées généralement gommer les « malentendus » auxquels nous aimons à ramener les rapports sociaux) ; tout doit se voir édit ficelé, positif, pédago, intemporel, universalisable, clos, rien ne saurait ouvrir sur la discussion, les options, ni paraître problématisable (devrais je dire méchamment « prise de tête » ?) ; c'est que ça nous semble dissolvant, alors même qu’au gré des forces centrifuges et isolantes de ce même social dans lequel nous rêvons intégration et reconnaissance, nous volons effectivement en éclats, les unes contres les autres, les unes contre elles-mêmes, mais chut, pas en parler, faire jolies et unies sur la photo (d’où des gentes disparaissent d’année en année, mortes ou éjectées, mais ça non plus, pas en causer, d’ailleurs le recrutement doit combler les vides, au pire on serre les rangs). Pourtant, vu l’état du « mouvement », son peu de représentativité, l’incrédulité pour tout dire qui habite la plupart des collègues devant ses prétentions et son paroli, on pourrait se dire que le silence ne sauve rien. Si ce n’est un sursis pour son organisation actuelle.  

 

Ce silence cachette notamment une de nos certitudes souffreteuses, toujours poussée en avant comme un bouclier pourtant sans aucune efficacité contre les coups : rien ne bouge, nous ne devenons rien, ne sommes rien devenues, et surtout ne deviendrons rien. Ni situables ni explicables. Nous ne ferions que dévoiler, manifester un toujours déjà été dont nous avons de toute façon le plan, les limites, les aboutissants. Trans’ n’est jamais apparue, il ne s’est jamais rien passé dans le rapport social de sexuation, et il s’y en passera encore moins si c’est possible. Évidemment ça ne doit pas non plus évoluer, diverger, se fragmenter, partir à droite et à gauche. Manquerait plus que ça, que trans’ ne soit pas alpha et oméga, l’origine et le bout, que quoi que ce soit d’autre et de nouveau puisse en issir ! Anathème. Tousses ensemble, dans la même signification sociale. Et conséquemment dans la reproduction scrupuleuse. Si c'est pas là aussi de la panique de genre, un refus de confronter ce que à qui sert le genre, ce qu'iel manifeste et reproduit socialement, je suis diaconesse.

 

Plus les choses bougent, glissent, se re et se dépositionnent, moins donc il faut les prendre en compte. Ce qui se passe doit tenir dans la boîte de sardines d’où on doit aboutir, qui est finalement le paradis cis’, sous ses diverses formes et espèces. Identité et approche, pensée, doivent se confondre. Distance zéro, voilà le salut. Il ferait beau voir qu’on puisse douter par exemple de la magie volontariste non binaire et se payer le luxe insolent de ne prospectivement pas adhérer au binaire comme devoir être plein de félicité. Nan mais. Autant dire qu’il pourrait paraître envisageable, appétent de bouleverser les buts convergents qui doivent orienter toutes les êtres sociales normalement constituées, de se poser la question si le genre n’est pas simplement une fonction de l’ordre relationnel et valorisateur, et autres divagations incroyablement dangereuses au moment même où nous faisons patte de velours, où nous nous présentons comme inoffensives, où nous essayons de démontrer qu’il n’y a pas de contradictions dans le rapport social et citoyen, que ce qui est bon pour nous l’est pour toutes, d’ores et déjà, en l’état de l’économie politique, et réciproquement. Bref encore une fois qu’y a pas de problèmes, qu’y a que des malentendus. Les cisses s’en fichent, rigolent de notre bonne volonté désarmée et sans biscuit, ne nous en écrabouillent pas moins, mais bon, comme ce que nous voulons est finalement ce qu’elles veulent, pas moyen, y nous faut trouver de quoi entrer dedans. Ou mourir. There is no alternative. Si on se met à ratiociner, patatras, tout le protocole est par terre, et où cela nous mènera-t il ? Frisson général.

 

Il y a décidément quelque chose qui monte chez nous, matière dense et étouffante, et qui produit, à mesure qu’elle s’approche de nos naseaux, de la bêtise. La bêtise telle que je l’entends n’a bien évidemment rien à voir avec des histoires de capacité ou d’intelligence ; nous en regorgeons et elles sont dramatiquement inutilisées, là encore par peur, peur les unes des autres, peur de (se) déranger. Non, la bêtise est une fonction sociale (parmi bien d’autres), conservatrice et fixiste. Une manière d’essayer de se fondre dans un « état des choses » dont on espère finalement qu’il va durer, avec les avantages et ses inconvénients. Une caméléonité aussi peu disserte que possible. Nos cerbères, nos universitaires, nos cadres quoi, sont les premières à avoir peur de leur ombre, et de ce qui pourrait leur échapper. Sauf que c'est tout à fait illusoire au demeurant en ce qui concerne la plupart d'entre nous, perpendiculaires à l'ordinaire. Et que cet état de choses, bien à rebours de notre craintive croyance en une rationalité inclusiviste, a toutes les chances de réclamer nos peaux et de les obtenir.

 

Partout, dans tous les cas de figure où l’on veut maintenir des certitudes fixes, arrêtées, univoques, masquer leurs inévitables évolutions et contradictions, il en résulte la peur et la panique, pasque bien évidemment ça bouge quand même, et bien plus même qu’on ne l’imagine, et jamais dans les sens prévus, désirés, historicisés. Bref, la panique, elle est chez nous, tout autant que chez les cis’, mais elle y fait des dégâts incommensurablement plus graves, car c’est que nous, nous n’en avons pas les moyens ; on a les moyens de se payer une panique et même de l'instrumentaliser quand est fortes, hégémoniques, qu’on répercute les frais sur les plus faibles. Nous on peut pas, alors nous nous attaquons, nous soupçonnons, nous réprimons, nous effrayons nous-mêmes – d’où notre tendance à tout moraliser. Et les conséquences passablement violentes en interne. Nous semblons même bien moins craindre pour notre équilibre celles ci, les injures, les opinions raccourcies, que l'apport d'arguments et de problématiques, à commencer de la part des concernées. Très "catholique tridentin" comme comportement : les jurons témoignent d'une saine, bonhomme orthodoxie, trois pater, deux ave et va en paix ma fille ; tandis que la tendance à discuter dogmatique doit mener au bûcher. Comme ça si nous coulons ce sera droit dans nos bottes et pavillon haut. C'est un peu d'ailleurs ce qui pourrait nous arriver.

 

Quelque part, oui, pourquoi, dans un tel contexte, ne pas faire la tortue collective ? Tout à fait okay, mais alors faisons là, matériellement, donnons nous en les moyens ; ne nous imaginons pas qu’une carapace de dits et d’invocations, cimentés de silences opportuns, va nous protéger en quoi que ce soit ! On pourra même conciliabuler et controverser en séparation. Ou pas. Mais notre bouche cousue, boule de gomme et communication de plus en plus sommaire et je dirais carrément foireuse ne sauvera aucune d’entre nous, je dirais même au contraire, selon la bonne vieille règle imposée qui entraîne l’autodestruction des minorités par elles-mêmes, dans leur passion à s’approprier les formes et fonctionnements convergentes et dominantes qui déterminent cette destruction.

 

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  • : transse et bie juskaux yeux ; vivisecte les économies politiques, premier, second marché ; acétone et antivitamine K - Le placard à Plume, la fem-garoue
  • : Un informel méthodique, exigeant, fidèle, pas plaintif, une sophistique non subjectiviste, où je ne me permets ni ne permets tout, où je me réserve de choisir gens et choses, où je privilégie le plaisir de connaître, c est là mon parti pris, rapport aux tristes cradocités qui peuplent le formel cheap, repaire des facilités, lesquelles en fin de compte coûtent bien plus. Je me vante un peu ? J espère bien. Déjà parce qu ainsi je me donne envie de mieux faire. Hé puis ho ! Z avez vu les fleurs et les couronnes que vous vous jetez, même l air faussement humble ? Faut dépercher ; quelqu'orgueil assumé vaut mieux qu une pleine bourse de roublardise attirante. Je danse avec le morcellement et la sape de l'économie, de la valorisation, de la fierté, de l'empouvoirement.
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Mieux vaut un beau champ de bataille qu'un moche terrain de lutte. Banzaï !

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